lundi 28 janvier 2008

Populisme

Ce gros mot fait horreur à la ­culture de gauche, en cela qu’il soustrait le peuple à l’emprise de ses grilles de lecture idéologiques. La gauche chérit le peuple abstraitement pourvu qu’il clame ses slogans en respectant sa vieille liturgie (manifs, grèves, affiliation aux partis et syndicats brevetés). Sinon, il est “facho”, il faut le museler. En réalité, le risque du populisme, c’est la chute dans la démagogie. Or la gauche, du moins en France, démagogise au ras des pâquerettes dès qu’une fraction de l’opinion s’émeut ou se lamente, fût-ce pour le maintien d’un privilège. Elle ne peut donc plus lâcher l’épouvantail “populisme” sans qu’il lui revienne en pleine tronche à la manière d’un boomerang. Voilà un symptôme parmi d’autres de l’obsolescence de sa démonologie. Les mots qu’elle dégainait jadis pour néantiser l’Autre en s’arrogeant une supériorité morale indue ne font plus mouche.
Denis Tillinac, écrivain, éditeur et journaliste. (valeurs actuelles du 11-1-2008)